Accueil » Blog » Finances locales : ce qui attend les collectivités en 2023

2022 est une année complexe pour les Services financiers des collectivités locales. Les budgets ont été fortement impactés par l’inflation et différents types de revalorisations intervenues ces derniers mois. La reprise d’activité liée à la sortie de la crise sanitaire n’est pas aussi simple qu’espérée. A quoi doivent s’attendre les collectivités dans les prochains mois ? Quels sont les changements à venir impactant les finances locales 2023 ? Décryptage.

Une inflation forte couplée à de multiples revalorisations

Chacun le constate dans sa vie quotidienne. Chaque organisation publique s’en rend compte en termes d’impact budgétaire. 2022 est marquée par une inflation pesante, la plus forte enregistrée depuis près de 40 ans (+ 6.5 % d’après l’INSEE[1]). Les prévisions économiques laissent entendre que cette évolution va s’installer dans la durée.

Même si la France fait partie des bons élèves (moyenne des prix en hausse de 11 % en Europe), elle est impactée par un enchaînement de faits :

  • la reprise économique post crise sanitaire a créé une pénurie (usines fermées, problèmes d’approvisionnement…),
  • la consommation a connu une relance sans précédent suite au déconfinement,
  • la guerre en Ukraine et les sanctions de la Russie ont conduit à une forte hausse des prix de l’énergie.

De plus, les collectivités ont dû faire face à une série de revalorisations financières. On pense ici notamment aux contrats d’achat d’énergie (en particulier l’électricité et le gaz), source de perturbation des prévisions budgétaires.

La revalorisation du point d’indice intervenue en juillet 2022 a mécaniquement augmenté la masse salariale des agents. Sont également intervenus la revalorisation des carrières et des rémunérations des agents de catégorie C, l’alignement du traitement minimum sur le Smic, l’amélioration du début de carrière des agents de catégorie B… Certaines organisations financent également une prime GIPA 2022 plus conséquente que l’année précédente.

Aussi, c’est sans surprise que des actions ont été entreprises dès la rentrée de septembre par de nombreuses communes pour accroître leurs recettes. Les tarifs des services aux famille (restauration scolaire, centres de loisirs…) ont été revus à la hausse, atteignant parfois des augmentations jusqu’à  40 % !

Ce mouvement devrait s’amplifier en 2023. Les compensations de l’Etat prévues par la loi de finances rectificative pour 2022, soit 600 millions d’euros, restent souvent trop partielles et les critères d’éligibilité éliminent de nombreuses entités. C’est par exemple le cas du dispositif visant à soutenir les communes les plus fragiles afin de résister à l’inflation et au dégel du point d’indice.

Une fiscalité dopant les recettes des finances locales 2023

Selon les prévisions présentées au sein de la note de conjoncture[2] publiée par la Banque Postale, les collectivités territoriales devraient générer davantage de recettes grâce au dynamisme de la fiscalité locale. Plusieurs éléments expliquent cette prévision encourageante.

Pour commencer, les taxes foncières devraient profiter d’une « revalorisation forfaitaire des bases particulièrement élevée ». En effet, cette dernière est indexée sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation. L’inflation étant forte, les taxes foncières vont progresser.

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Du côté de la fiscalité indirecte, la TVA s’élèverait à 40,7 milliards d’euros et constitue désormais le principal impôt local. Elle pourrait enregistrer en fin d’année une progression proche de 9 %.

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A l’inverse, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) pourraient diminuer. En effet, ils correspondent aux taxes que les collectivités locales et que l’Etat imposent lors de la vente d’un bien immobilier. Avec la forte remontée des taux d’intérêts et la frilosité des banques concernant l’accord de crédits, le nombre de transactions pourrait ralentir de manière remarquable.

Second point, les collectivités pourraient enregistrer des rentrées financières plus conséquentes grâce aux impôts économiques. Pour rappel, ces derniers se composent des éléments suivants :

  • La contribution économique territoriale (CET) ;
  • La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE);
  • la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;
  • Les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux (IFER) ;
  • et la taxe sur les surfaces commerciales.

Grâce à la reprise économique, les montants des prélèvements fiscaux devraient dépasser ceux de la période précédent. Pour autant, des évolutions ont été annoncées par le Gouvernement : la CVAE devrait être réduite en 2023, avant de disparaître totalement l’année suivante. Les modalités de compensation ne sont pas encore connues…

Dernier élément, la note de conjoncture annonce l’augmentation des taux de la TFPB (taxe foncière sur les propriétés bâties). La taxe d’habitation des résidences secondaires pourrait alors s’assouplir, en particulier au sein des communes n’étant pas éligibles au dispositif de majoration de cette taxe.

L’impact de la refonte des indicateurs financiers

Suite à la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, une réforme des indicateurs financiers servant aux calculs des dotations et de la péréquation a été adoptée. Les premiers effets de ce nouveau dispositif devraient commencer à produire leurs résultats en 2023. Ainsi, en 2022, les communes et ensembles intercommunaux ont profité d’une neutralisation intégrale des nouvelles règles. Un lissage des effets de bord est d’ailleurs prévu jusqu’en 2028, car l’impact potentiel sur les ressources des collectivités est reconnu pour être particulièrement fort.

Les travaux du Comité des finances locales ont montré que le maintien de la notion de « potentiel » fiscal était discutable. Aussi, il est tout à fait envisageable qu’une révision plus profonde du système soit proposée, sur l’initiative d’élus locaux.

La limite de la dépense locale

Les contrats de Cahors visaient à limiter l’évolution des dépenses de fonctionnement des plus grandes collectivités. Suite à la crise sanitaire, ces dispositifs ont été suspendus. Pour autant, le programme de stabilité 2022-2027 paru cet été réenclenche la contribution des collectivités à l’effort de redressement des comptes publics. Les modalités encadrant cette démarche devraient être entérinées par la loi de programmation des finances publiques 2023-2027.

« Le programme de stabilité 2022-2027 a été présenté en Conseil des ministres le 29 juillet 2022. Il retrace la trajectoire des finances publiques fixée par le Gouvernement à l’horizon de 5 ans pour transmission à la Commission européenne. Ce nouveau programme confirme la participation des collectivités locales à la limitation de l’évolution des dépenses publiques qui sera engagée dès 2023 pour parvenir en 2027 à un déficit public de 3 % du PIB et à une dette stabilisée.  (…)

Compte tenu de cette maîtrise des dépenses, les APUL seraient à l’équilibre en 2024-2025 puis deviendraient même excédentaires en 2026-2027 (leurs recettes hors emprunts seraient supérieures à leurs dépenses hors remboursements d’emprunts), ce qui entraînerait une baisse de leur encours de dette. Les modalités concrètes de la contribution des collectivités locales à l’effort de maîtrise des dépenses de fonctionnement doivent faire l’objet, selon le texte du programme, d’une concertation. »

Source : Note de conjoncture

Cet été, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, a confirmé que l’effort de 10 milliards d’euros demandé aux collectivités n’était plus à l’ordre du jour. Cet objectif d’économies avait été mis en avant lors de la campagne présidentielle.

Pour autant, Bruno Le Maire avait ensuite affirmé que « les dépenses courantes continueraient donc à progresser, de l’ordre de 24 milliards d’euros en cinq ans selon les estimations de la direction générale du Trésor ». Une progression de l’ordre de 0.5 % qui laisserait présager la dégradation de l’offre des services aux citoyens, ou une pression fiscale plus soutenue.

La transition écologique, aimant à dépenses ?

Quid des dépenses des collectivités à mobiliser concernant le secteur de l’environnemental ? Un pilier des finances locales 2023 ?

Plusieurs dispositifs d’Etat visent à encourager la transition écologique. Parmi ces derniers, la Loi REEN impose une étape clé au 1er janvier 2023 : il s’agit pour les collectivités concernées par la réforme d’élaborer un programme de travail comprenant notamment un état des lieux des acteurs concernés et un bilan de l’impact environnemental du numérique.

Pour évaluer la part de leur budget consacré aux enjeux RSE, les collectivités ont tout intérêt à construire un budget vert. Pour tout savoir sur ce sujet, téléchargez le livre blanc L’agent public, acteur de la transition écologique.

La Première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé fin août la création d’un « fonds vert » doté d’une enveloppe d’1,5 milliard d’euros. Ce dispositif est destiné à accompagner les collectivités locales dans leurs actions. La réforme de la dotation biodiversité a également été confirmée cet été : un plus grand nombre de communes devient éligible, soit environ 5 000 organismes publics.

A date, la part du budget d’une collectivité devant être dédiée à la transition écologique reste floue. Au vu des enjeux forts et pressants portés par cette thématique, des précisions devraient être apportées sur les efforts à fournir à moyen terme par les collectivités territoriales.

[1] https://www.insee.fr/fr/statistiques/6523439

[2] https://www.labanquepostale.com/newsroom-publications/etudes/etudes-finances-locales/secteur-public-local/note-conjoncture-finances-locales-tendances-2022.html